Hommage à la Présence Marianiste Soixantenaire
par Fr. Anselme Agbessi
Dieu se fait Présence et nous convie à la mémoire de soixante ans de l’histoire marianiste sur la Terre de nos aïeux. C’est un évènement solennel qui s’invite dans notre quotidien et ne demande qu’à trouver demeure dans nos cœurs pour y jouer une musique en chœur avec toute la cour céleste. Il y a 60 ans, Fr. Auguste Augustin, Fr. Pierre Cattin et P. Stephan Hoïn venant de la Suisse foulèrent le sol de notre Togo, tels les rois mages chargés de leurs précieuses offrandes et guidés par l’étoile. La plupart d’entre nous n’étaient pas encore de ce monde. Les rares qui y étaient, n’avaient guère conscience de ce qui venait à la vie dans un pays où ne brillait pas encore le soleil des indépendances.
Nous étions alors engagés dans une histoire qui nous dépasse mais que nous portons et qui nous grandit. Aujourd’hui, il n’y a pas meilleure disposition de notre part que l’hommage et l’action de grâce devant la Présence de ce qui se laisse accueillir, mais qui, la première, avant nous, nous a accueillis. Heureuse Présence qui nous introduit dans l’histoire et à ce moment précis de cette histoire, où Dieu lui-même nous rejoint.
La Société de Marie dans ses plus beaux décors du terroir est à cette occasion le cœur et le chœur du monde. Mais c’est aussi toute la nation togolaise, l’Eglise et la Famille Marianiste qui fait hommage à la Présence Marianiste soixantenaire. Nous sommes réunis de partout sur les premiers pas et lieux de cette Présence, en communion avec nos bienheureux fondateurs, nos pionniers et tous nos devanciers, présents à travers l’esprit de leurs œuvres en nous.
L’heureuse coïncidence de ce jubilé de diamant avec l’élan général de la Société de Marie, à être, selon le dessein de notre Bienheureux Fondateur, P. Guillaume Joseph Chaminade, « l’homme qui ne meure point », est à accueillir dans le sens de la providence divine qui conduit l’histoire. Nous sommes à cette occasion le modèle de cet «homme qui ne meure point » plongé dans la radicalité de sa perpétuelle Présence dans l’histoire.
Notre Présence dans l’histoire est d’autant plus vénérable qu’elle reçoit toute son origine, sa dignité et sa permanence en Dieu. Mais cette Présence est aussi l’œuvre en nous de Marie, celle-là même qui nous engendre continuellement à la vie de son Fils Jésus qui est véritablement « l’homme qui ne meurt pas ». Tout le mérite et tout honneur est à elle qui nous indique comment demeurer unis entre nous et à son Fils comme des sarments au cep.
La symbolique de l’arbre choisie pour ce jubilé rejoint ainsi convenablement notre vocation à être « l’homme qui ne meure point », fils de la terre. L’arbre de notre Présence Marianiste a grandi et produit des fruits à Lama-Kara. Ses fruits ont produit à leur tour la graine qui a fait pousser d’autres Présences d’arbres de la même espèce que le premier à Sotouboua, à Lomé et à Natitingou (Bénin). Nos pionniers ont planté, leurs successeurs ont arrosé et entretenu ; nous récoltons puis semons à notre tour: œuvre de « l’homme qui ne meure point ».
Nous sommes cet « homme » qu’aucun endroit ne contient ni n’enferme, le voyageur, le pèlerin, le missionnaire sur les sentiers qui mènent vers l’horizon. Aujourd’hui n’est qu’un moment de ce voyage sans fin ni lieu. Notre Présence, nous apparaît-il maintenant plus clairement, est l’œuvre en nous, depuis nos pionniers, de l’Esprit qui souffle inlassablement vers l’horizon de notre perpétuel devenir.
Il est heureux qu’à cette occasion jubilaire, deux des nôtres se donnent définitivement par les vœux perpétuels à la Société de Marie. A 60 ans, la Région des Frères Marianistes au Togo et au Benin est jeune, vigoureuse et créative de la jeunesse, de la force et de la créativité de Nicolas Assogba et de Lucien Gnakou. Que les deux œuvrent actuellement dans les deux pays de notre Présence Marianiste, voilà derechef une remarquable preuve de « l’homme qui ne meure point », l’homme d’ici et d’ailleurs.
C’est alors un hommage hautement mérité qu’il convient de te rendre, Présence Marianiste au Togo et au Bénin, pour tant de merveilles accomplies dans la vie des fils et filles de ces pays. Le charisme que tu as insufflé, les communautés que tu as implantées, les écoles que tu as fondées, les champs que tu as labourés, les arbres que tu as plantés, les personnes que tu as formées produisent sans répit des fruits insoupçonnables.
Hommage à tes plus fidèles et premiers serviteurs Robert Mattlé, Auguste Augustin, Pierre Cattin et Stephan Hoïn qui t’on servi, dans la foi, de tout leur cœur jusqu’à l’usure leur force. Le sens missionnaire et l’intelligence de P. Mattlé nous éclairent. Le réalisme, le leadership et l’engagement humain du Fr Augustin nous stimulent. Le dévouement sans limites, l’audace et la ferveur de Fr Cattin nous soutiennent. La joie, la simplicité, l’accueil et l’engagement écologique de P. Hoïn nous défient.
La Terre de nos aïeux a rendu, déjà de leur vivant, un grand hommage à ces valeureux pionniers, lorsque en reconnaissance pour son travail remarquable, Fr Auguste Augustin a reçu du gouvernement togolais en 1972 la distinction d’Officier de l’Ordre du Mono. Fr Pierre Cattin a reçu le même mérite du Togo le 13 janvier 1980. Le gouvernement français a également décerné au Fr Cattin la distinction de Chevalier dans l’Ordre des Palmes académiques le 28 janvier 1981 puis celle d’Officier dans l’Ordre des Palmes Académiques le 28 juillet 1989. Nous voulons, aujourd’hui, en réitérant nos hommages à nos illustres pionniers, que l’histoire se souvienne à jamais de leur engagement indéfectible.
Hommage à tous les Frères Missionnaires Suisses vivants ou morts qui ont, à la suite des pionniers, dans le silence de Dieu, au long des années, à toute épreuve, et jusqu’à ce jour mémorable, maintenu allumé le feu de la Présence Marianiste chez nous. Ils sont pour nous le signe de la fidélité et de la sollicitude constantes de Dieu agissant réellement dans notre histoire.
Enfin, nous tes héritiers, Présence Marianiste Soixantenaire, sommes en admiration devant la grandeur de ton œuvre et de ton legs, et n’implorons du Ciel que la grâce de pouvoir maintenir ta flamme toujours aussi vive et agissante dans le cœur des hommes, en tous lieux et en tous temps, pour la gloire de Dieu et l’honneur de Marie.
Fr Anselme Agbessi, sm.